Fiche n°26 : Sécurisation des accords
Elle repose sur deux types de dispositions de la loi du 19 janvier 2000 :
I. La validation des clauses des accords qui n’avaient pas de base juridique à la date de leur conclusion et qui en trouvent une dans le cadre de la loi de réduction négociée du temps de travail.
Les accords conclus en application de la loi du 13 juin 1998 ont pu sur certains points anticiper l’évolution du cadre juridique de la durée du travail opéré par la seconde loi. Le paragraphe I de l’article 28 a pour objet d’éviter une renégociation des clauses qui trouvent une base juridique dans la seconde loi (cf. tableau annexé).
Les clauses des accords ayant prévu des calendriers individualisés organisant l’activité des salariés selon des plages différentes mais s’inscrivant dans le cadre d’une modulation de l’horaire collectif sont ainsi validées (cf. fiche n° 9).
S’agissant du temps de travail des cadres, les clauses ayant mis en place des forfaits annuels en heures ou en jours, pour les cadres au sens des conventions collectives visés à l’article L. 212-15-3, sont validées. Concernant les forfaits annuels en jours, le nombre de jours travaillés dans l’année ne peut, en tout état de cause, dépasser 217.
S’agissant du temps partiel, le nouvel article L. 212-4-6 prévoit une forme de modulation du temps partiel, sous réserve que la durée sur l’année ne dépasse pas en moyenne la durée contractuelle exprimée en semaine ou en mois (cf. fiche n° 14 ). Dès lors que les accords s’inscrivent dans le cadre de l’article L. 212-4-6, la mise en place d’une modulation du temps partiel se trouve validée.
En ce qui concerne le compte épargne temps ( CET ), sont validées les clauses des accords ayant prévu une utilisation des droits à congés acquis dans le compte épargne temps en vue d’un passage à temps partiel, du financement des actions de formation effectuées en dehors du temps de travail dans le cadre de l’article L. 932-1 du code du travail et de l’accord national interprofessionnel du 3 juillet 1991, ou d’une cessation progressive ou totale d’activité pour les salariés de plus de 50 ans.
Sont également validées les clauses ayant prévu une affectation dans le compte épargne temps des heures effectuées au-delà de la durée collective du travail, dans la limite de 5 jours par an et à condition que le nombre de jours acquis à ce titre dans le CET ne dépasse pas 15 jours. En outre, les clauses ayant prévu une utilisation collective de ces jours affectés au CET entrent également dans le champ du paragraphe I de l’article 28.
Enfin, les clauses des accords conclus postérieurement à la loi du 13 juin 1998 et relatives à la formation professionnelle sont, en application des dispositions de l'avant dernier alinéa de l'article L. 932-2, validées, dès lors que sont respectés les principes posés par ce nouvel article : les formations s'inscrivant dans le cadre du devoir d'adaptation incombant à l'employeur constituent un temps de travail effectif et les formations de développement des compétences, organisées pour partie hors du temps de travail, doivent être effectuées à la demande du salarié ou recueillir son accord écrit.
II. La validation des clauses conformes au cadre juridique existant à la date de leur conclusion et dont la base juridique se trouve remise en cause par la loi du 19 janvier 2000
Les effets du second type de dispositions portant sur la validation des accords doivent être analysés en fonction des termes de la loi tels qu’ils résultent de la décision n° 99 423 DC du conseil constitutionnel du 13 janvier 2000. Ainsi, doivent être incluses dans le champ de la sécurisation, toutes les clauses des accords conformes à la législation applicable à la date de leur conclusion dès lors que cette dernière est antérieure au 20 janvier 2000, date de publication de la seconde loi. Sont donc validées les seules clauses, en dehors des cas visés au paragraphe I de l’article 28, conformes à la législation applicable à la date de la conclusion des accords.
2.1- Le champ de la validation des clauses légales à la date de la conclusion des accords : la distinction entre clauses normatives et clauses non normatives
La sécurisation des accords porte sur les clauses ayant eu par rapport au cadre juridique existant au moment de leur conclusion un effet proprement normatif. En revanche, des clauses se limitant à faire référence à des dispositions légales, soit en les visant, soit en en reprenant textuellement le contenu, sont sans portée et ne sont pas susceptibles de priver d’effet les modifications des dispositions en question opérées par le législateur.
Ainsi, la définition légale du travail à temps partiel (article L. 212-4-2 nouveau : durée contractuelle inférieure à la durée légale ou conventionnelle) s’applique et est opposable à l’ensemble des accords ayant fait référence à la définition du temps partiel en vigueur à la date de leur conclusion (durée contractuelle inférieure d’au moins un cinquième à la durée légale ou conventionnelle). Il en va de même des clauses portant sur la définition du temps de travail effectif reprenant les termes de l’article L.212-4 dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de la seconde loi.
2.2- La validation au titre des dispositifs spécifiques de sécurisation ( articles 8, 9, 12, et 14 de la loi )
La loi prévoit plusieurs dispositifs de sécurisation de clauses des accords conclus antérieurement au 20 janvier 2000 et conformes au droit existant à la date de leur conclusion : ils concernent la modulation (article 8 paragraphe V), la réduction du temps de travail sous forme de jours de repos (article 9 paragraphe II), le temps partiel (article 12 paragraphe IX), et la formation professionnelle (article L. 932-2, cinquième alinéa).
S’agissant de la modulation du temps de travail, les accords conclus antérieurement à la date du 20 janvier 2000 font l’objet d’une validation expresse (paragraphe V article 8), quel que soit le type de modulation (I, II, III) et la durée hebdomadaire moyenne, y compris si elle supérieure à 35 heures, fixée par l’accord.
S’agissant des clauses établissant des durées moyennes hebdomadaires supérieures à 35 heures, elles sont sécurisées sous réserve de l’application du régime des heures supplémentaires (L. 212-5, L. 212-5-1 et L. 212-6) aux heures excédant en moyenne sur l’année le niveau de la durée légale. Sont ainsi validés des accords de modulation prévoyant une durée hebdomadaire moyenne de 37 heures, le régime des heures supplémentaires étant applicable aux heures effectuées au-delà d’une durée annuelle, calculée sur une base de 35 heures, conformément aux dispositions de l’ancien article L.212-8-2.
S’agissant des clauses fixant des durées annuelles supérieures à 1600 heures, elles ne sont sécurisées que sous réserve de leur conformité avec le mode de décompte en vigueur à la date de conclusion de l’accord (L. 212-8-2-II ancien {durée fixée par l’accord diminuée des heures correspondant aux jours de congés légaux ou conventionnels au niveau de la branche ou de l’entreprise}).
Dans ce cas, le régime des heures supplémentaires s’appliquera aux heures effectuées au-delà de la durée annuelle fixée par l’accord.
De même, les clauses prévoyant l’existence de délais de prévenance inférieurs à 7 jours ouvrés en dehors des conditions fixées à l’article L. 212-8, l’existence de périodes hautes dépassant 44 heures sur 12 semaines consécutives et pouvant atteindre 46 heures, ou ne prévoyant pas certaines des mentions prévues à l’article L. 212-8 (condition de recours au travail temporaire) sont sécurisées.
Les accords ne prévoyant pas les clauses fixées par l’article L. 212-9 (délais de prévenance par exemple) dans le cadre de la réduction sous forme de jours de repos continuent de produire leurs effets.
S’agissant du temps partiel, les accords de branche conclus sur la base de l’article L.212-4-3 dans sa rédaction antérieure à la date de publication de la loi, et ayant prévu des dérogations au régime du droit commun du temps partiel (augmentation du volume des heures complémentaires au 1/3 de la durée contractuelle, abaissement du délai de prévenance de 7 à 3 jours, augmentation du nombre ou de la durée de la coupure quotidienne), font également l’objet d’une validation expresse. La disposition prévue par le nouvel article L. 212-4-4 prévoyant une contrepartie spécifique à l’abaissement à trois jours du délai de prévenance n’est donc pas opposable aux entreprises mettant en oeuvre un accord étendu de branche conclu avant le 20 janvier 2000.Le paragraphe IX de l’article 12 de la loi prévoit cependant l’application du nouveau régime de majoration des heures complémentaires (L. 212-4-4 alinéa 3) à compter du 1er février 2000.
Par ailleurs, les contrats de travail à temps partiel annualisé conclus avant le 20 janvier 2000 demeurent en vigueur. Les heures effectuées au-delà du dixième de la durée fixée au contrat donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % à compter du 1 février 2000 ( paragraphe IX de l’article 12 de la loi ).
2.3- La validation au titre du paragraphe II de l’article 28 de la loi
Le paragraphe II de l’article 28 a pour effet de sécuriser des clauses conventionnelles antérieures à la publication de la loi, mais qui, n’entrant ni dans le champ du paragraphe I de l’article 28, ni dans celui des dispositifs spécifiques de validation (articles 8, 9, 12 et 14), se trouveraient remises en cause par le nouveau cadre législatif de la durée du travail. Ces clauses continuent de produire leurs effets à condition d’être conformes à l’état du droit à la date de la conclusion de l’accord et sous réserve de l’application des dispositions légales relatives aux heures supplémentaires (L. 212-5, L.212-5-1, et L. 212-6)
Ainsi, les clauses relatives à l’utilisation des droits acquis dans le cadre du compte épargne temps qui s’avèrent non strictement conformes aux nouvelles conditions de l’article L. 227-1 fixant une limite de cinq ans à la prise des congés, sauf dans les cas prévus par la loi, sont sécurisées. De même, les dispositifs de compte épargne temps organisés sur la base d’accords prévoyant une alimentation en repos acquis au titre des jours de congés payés, en jours RTT (L. 212-9), en bonifications, en repos compensateurs de remplacement au-delà du seuil de 22 jours prévus au septième alinéa de L. 227-1 continuent de produire leurs effets.
En dehors des cas de modulation qui font l’objet d’une validation expresse au titre de l’article 8 paragraphe V, les clauses ayant prévu des durées maximales hebdomadaires moyennes de plus de 44 heures sur 12 semaines consécutives continuent de produire leurs effets.
III. Un certain nombre de clauses des accords de réduction du temps de travail, illégales à la date de leur conclusion, manquent toujours de base légale au regard de la seconde loi, et ne sont donc pas validées.
Il s’agit essentiellement de certaines clauses relatives au temps de travail des cadres, au régime du temps de formation, au décompte du temps de travail sur l’année.
S’agissant du temps de travail des cadres, l’établissement d’un forfait sans référence horaire au-delà des cadres dirigeants, définis au nouvel article L. 212-15-1, ne trouve pas dans la loi de réduction négociée du temps de travail de fondement juridique justifiant la validation des clauses des accords concernées sur le fondement du paragraphe I de l’article 28. Ainsi, les accords ayant étendu un forfait sans référence horaire à des catégories de cadres pour lesquels la jurisprudence ne l'admettait pas et qui ne remplisse pas les critères constitutifs de la catégorie des cadres dirigeants définis par la loi (importance des responsabilités, grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, pouvoir de décision autonome, niveau élevé de rémunération ), n’entrent pas dans le champ de la validation fixée à l’article 28.
Il en va de même des clauses établissant des forfaits annuels pour des salariés ne relevant pas de la catégorie de cadres au sens des conventions collectives ou de l’article 9 1er alinéa de la convention AGIRC du 14 mars 1947 ou ne pouvant, s’agissant du forfait annuel horaire, être considéré comme des salariés itinérants au sens de l’article L.212-15-3. Dans le cas où un accord mettrait en place un forfait en jours et fixerait un nombre de jours supérieurs à 217, l’accord sera validé mais le nombre de jours de travail ne pourra pas dépasser le plafond de 217 jours.
S’agissant du temps de formation, les clauses des accords ayant exclu de façon globale le temps de formation du temps de travail effectif demeurent incompatibles avec la définition légale du temps de travail effectif et le régime du plan de formation.
Article 8 Article 9 Article 12 Article 17 Type de clauses Clauses prévoyant une modulation I, II ou III Clauses prévoyant une RTT sous forme de jours de repos Clauses dérogeant au temps partiel Clauses prévoyant des formations en dehors du temps de travail effectif. Contenu des clauses périodes hautes > 44 h sur 12 semaines, délais de prévenance < 7 Absence de délai de prévenance 1/3 heures complémentaires, coupures, abaissement du délai de prévenance Conditions particulièresAntérieur au 20 janvier 2000 date de publication de la loi
Sous réserve de l’application du régime des heures supplémentaires à compter de la 36e heure en moyenne
Sous réserve du respect du mode de décompte de la durée moyenne hebdomadaire en vigueur à la date de conclusion de l’accord
Sans limitation de durée
Antérieur au 20 janvier 2000 date de publication de la loi
Sous réserve de l’application du régime des heures supplémentaires à compter de la 36e heure en moyenne
Sans limitation de durée
Antérieur au 20 janvier 2000 date de publication de la loi
Sous réserve du régime de majoration des heures complémentaires
Sans limitation de durée
Accords conclus en application de la loi du 13 juin 1998 (L. 932-2)
Sous réserve du respect de l’obligation d’adaptation et de l'initiative ou de l’accord du salarié
Sans limitation de durée
Article 28
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Paragraphe I
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Paragraphe II
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Clauses validées au titre du paragraphe I ou maintenues au titre du paragraphe II |
Modulation (calendriers individualisées) article L. 212-8 alinéa 9. Cadres (forfaits annuels en heures ou en jours si < 217 jours article L. 212-15-3 Temps partiel (modulation) article L. 212-4-6 Compte épargne temps (utilisation pour un passage au temps partiel, une cessation d’activité ou des formation hors temps de travail) article L. 227-1 Compte épargne temps (affectation des heures > durée collective et utilisation collective des repos acquis à ce titre par les salariés) article L. 227-1 |
Compte épargne temps (délai de prise des congés non prévu par l’accord ou dans des délais inférieur ou délai légal de 5 ans) L. 227-1 Toute clause d’un accord loi du 13 juin 1998 en vigueur à la publication de la seconde loi mais nécessitant un ajustement. |
Conditions particulières
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Accords conclus en application de la
loi du 13 juin 1998 et conformes à la seconde loi
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Accords conclus en application de la
loi du 13 juin 1998 et conformes avec les dispositions applicables à
la date de la conclusion
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